KOSUKE (27 ans/étudiant)
07/09/2009
Kosuke, 27 ans, se confie suite aux élections législatives d’août 2009 au Japon. Au cours de cet entretien, Kosuke aborde le rapport des jeunes Japonais à la politique, les espoirs mais aussi les doutes suscités par l’alternance ainsi que l’excitation qu’il a pu ressentir en suivant un débat public animé.
As-tu voté lors des élections de la semaine dernière ? Si non, pourquoi/Si oui, pourquoi ? Votais-tu pour la première fois ?
Oui j’ai voté. Que le scrutin soit national ou régional, mes pieds me portent naturellement jusqu’au bureau de vote depuis les dernières élections législatives, il y a quatre ans, à moins que je ne sois pas en mesure de m’y rendre. Si je vote, c’est par conviction. Je pense qu’il est nécessaire que chacun participe aux élections afin d’œuvrer à la construction de la démocratie au Japon. Il y a encore 60 ans, le Japon était une Nation militaire. La démocratie a été implantée après la défaite par les américains. En d’autres termes, la démocratie est bien présente, mais je pense que la population n’a pas conscience qu’il faut a soutenir. Il faut que les Japonais, plus encore que les habitants d’aucun autre pays, participent activement aux élections afin que la démocratie arrive à maturité. Concernant cette élection, je pense qu’il y a d’autres raisons qui m’ont poussé à voter. La date du scrutin a été décidée bien en avance et le débat a bien eu lieu ; en comparaison à d’autres élections, j’ai pu en sentir toute l’importance.
Etais-tu particulièrement intéressé par les enjeux de cette élection ?
Lors de cette élection, les questions du modèle politique, du modèle économique, mais aussi de la crise ont été abordées. Bien plus que par le passé, il me semble que l’intérêt des Japonais était prononcé. Inévitablement, je n’ai pas fait exception.
L’intérêt des jeunes pour la politique t’a-t-il semblé plus fort pour les élections générales de 2009, comparé aux élections précédentes ?
Lors des quatre dernières années, le chômage des jeunes a progressé inéluctablement. De plus, des thèmes tels que l’augmentation du nombre de travailleurs irréguliers, des personnes contraintes d’accepter des conditions de travail difficiles, ou encore des licenciements faisant fi de la dignité des travailleurs, ont bénéficié d’une importante couverture médiatique. Dans de telles circonstances, il n’est pas difficile d’imaginer que le mécontentement des jeunes et leur sentiment d’insécurité aient pris de l’ampleur. L’intérêt qu’ils portent à la politique semble être renforcé, mais en même temps, ce phénomène pourrait témoigner d’une défiance envers les institutions. Naturellement, je fais partie de ces jeunes. Là, je fais référence aux jeunes qui ont véritablement eu à vivre la recherche d’emploi. Jusqu’à ce que les jeunes étudiants entrent dans la période de recherche d’emploi – en général, celle-ci débute entre la fin de la troisième année d’université et le début de la quatrième – ils n’ont pas l’occasion de connaitre le monde professionnel, du fait du fossé qui existe entre ces deux univers. Par conséquent, ils n’ont pas vraiment d’intérêt pour la politique.
On dit que les politiciens japonais ne s’adressent pas aux jeunes, qu’en penses-tu ?
Cette question a lieu d’être dans d’autres pays. Si on se limite aux médias japonais, on n’a pas l’impression que les politiciens des autres pays s’adressent particulièrement aux jeunes – mais peut être est-ce un problème de partialité des médias japonais. Quoiqu’il en soit, si je me réfère aux dernières élections en France, j’ai pu voir Sarkozy ou Royal s’adresser aux jeunes. Ceci démontre le fort intérêt pour la politique des jeunes français ; les politiques n’ont d’autres choix que d’y répondre. Par conséquent, je pense que le manque d’intérêt des politiciens pour les jeunes tire son origine du manque d’intérêt des jeunes pour la politique.
Crois-tu que l’alternance politique entre le PLD/自民党 et le PD/民主党 va rendre la vie politique japonaise plus passionnante ? Penses tu que le taux de participation aux élections à l’avenir va augmenter ?
Concernant le fort intérêt qui a entouré cette élection, il était uniquement dû au mécontentement envers la politique national. Par conséquent, il est plus facile d’opter pour l’alternance politique plutôt que de choisir la stabilité. Autrement dit, c’est le fort intérêt pour la politique nationale qui a été le moteur de l’alternance. Je ne crois pas en la théorie selon laquelle la possibilité de l’alternance renforcerait l’intérêt de la population pour les futures élections ou pour la politique intérieure.
Est-ce que tu entendais autour de toi les gens parler de politique plus que d’habitude ? As-tu discuté politique avec tes amis ?
J’ai entendu, à de nombreuses occasions, ma famille ou mes bons amis discuter des élections. J’étais moi-même actif.
Les japonais croient ils vraiment en la politique annoncée par M. Hatoyama ?
Le PD a mis en avant l’engagement public, mais la population ne pense pas que cet engagement pourra être tenu, n’a pas vraiment l’espoir de voir les réformes être mises en application. En ce qui concerne les réformes politiques visant la bureaucratie ou l’interdiction du pantouflage auxquelles la population adhère, je pense qu’il y a une attente mêlant espoir et doute.
Pourquoi le PLD/自民党a-t-il perdu selon toi ?
Le système a perduré pendant 55 ans avec un faible niveau de mécontentement dans la population et une majorité de personnes satisfaites avec leur vie. Le PLD s’est désintéressé de la population, ce qui n’a pas de conséquences fâcheuses, jusqu’au moment où celle-ci doit faire face à de nombreux malaises. Le PLD a payé cette attitude. Ensuite, je pense que la gestion désastreuse du PLD durant les quatre dernières années a été le détonateur de la débâcle. Néanmoins, ce serait une erreur de réduire la défaite à un rejet du PLD. Le PD actuel comprend dans ses rangs de nombreux politiciens ex-PLD ayant fait sécession.
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